Mon smartphone et moi

Nous avons tous.tes un smartphone ou presque, certain.es en ont même 2 voire 3 … on ne sait jamais. En à peine 25 ans, cet objet a pris une place considérable dans nos vies au point que même notre vocabulaire s’en trouve modifié … « en mode » sans problèmes.

Épisode 1 : mon téléphone est toute ma vie

Il y a encore quelques années, j’avais, comme l’immense majorité de la population, un smartphone. J’étais de la bande des iphone. Comme la plupart d’entre nous, il était bardé d’applications qui me donnaient l’heure, des nouvelles de mes ami.es (ou pas), des nouvelles du monde, m’alertait quand il avait décidé que c’était important, m’indiquait mon chemin, me permettait de me détendre avec quelques jeux, me donnait la définition des mots que j’ignorais, l’histoire de cet homme ou de cette femme important.e, me rappelait de souhaiter l’anniversaire de mes enfants et me disait même comment cuisiner ou quelle fille draguer, parfois même il me parlait et me répondait (voire peut-être, m’écoutait) … une vraie nounou, bien mieux qu’un simple doudou. Je ne le quittais plus. Il était mon épouse, ma maîtresse, mon collègue de travail et mon tuteur … il me tenait droit et flattait mon ego, grâce à lui, j’avais plein de compétences, je me sentais tellement puissant.

Épisode 2 : les divorces

Un jour, fatigué de payer le moindre petit câble 3 fois le prix d’un dîner au restaurant, je divorçais d’iphone et passait à Androïd. Je ne le savais pas encore mais ce changement était le premier d’une longue liste qui allait me déstabiliser et me faire (un peu) reprendre le contrôle de ma propre vie.

Donc, après 20 ans de fidélité à la pomme et à son système, je la trompais et passais à l’ennemi. Du jour au lendemain, j’étais … paumé ! Rien ne fonctionnait de la même façon, ma musique était introuvable, l’ergonomie était différente, mes doigts ne savaient plus où se poser … un enfer. Il m’a fallut plusieurs semaines pour m’habituer ! Mais, dans cet enfer, je prenais conscience d’une chose : mon téléphone m’avait totalement formaté le cerveau, c’est lui qui m’avait dit comment faire et avait fini par décider du moindre de mes gestes.

Fort de ce premier constat, je décidais de supprimer bon nombre d’appli (d’autant que je n’arrivais plus à les trouver) et surtout à ôter les « notifications » et autres « alertes ». Tout d’un coup, ma vie devint beaucoup plus calme et moins soumise à une urgence totalement imaginaire. Je n’apprenais les catastrophes du bout du monde (et auxquelles je ne peux rien) que le lendemain, les « post » sur facebook ne venaient plus titiller ma curiosité et mes émotions me poussant (en vain) à répondre ou commenter à tout va, et le « like » de ginette ne me précipitait plus dans des rêves torides ou des abîmes de désespoirs (vains eux aussi). Quant aux sms, ils pouvaient attendre quelques heures que je les vois.

Ne lisant plus les réseaux sociaux que rarement et faisant nécessairement le tri dans mes réactions aux interventions des un.es et des autres, tout mon être se détendait lentement. C’est là que je pris cette décision invraisemblable : me séparer aussi des réseaux que l’on dit sociaux ! Fin de facebook, au diable what’s app, terminé Linkedin ! Le pire, fut de constater cette légère appréhension qui naissait dans ma gorge ! Oui, j’avais peur ! Peur de ne plus être « connu », de ne plus être vu, de sortir du champs de vision de ceux qui m’entourent. Et finalement, non seulement rien de tout cela ne s’est passé, mais maintenant, quand on me fait signe, c’est réellement important : je ne rate rien sauf ce qui ne servait pas à grand-chose les commentaires des commentaires.

Épisode 3 : changement de couple

Après quelques mois de ce régime et constatant que non seulement tout se passait bien mais qu’en plus mon temps n’était plus rempli du stress de la réponse immédiate et donc essentiellement émotionnelle, que la météo est bien plus claire en levant les yeux au ciel qu’en les baissant vers mon téléphone, que le temps gagné me permet de flâner et d’admirer, que rien ou presque n’est urgent, que bien-sûr, je ne suis pas averti en « direct live » des affaires du village mais que le lendemain on me raconte les yeux dans les yeux ce qu’il reste d’essentiel une fois que la mousse est retombée, que quand on ne me raconte rien c’est simplement que ce n’était que de la mousse, l’étape suivante s’est naturellement imposée … la fin du smartphone !

Là encore, une petite appréhension s’est immiscée mais, je la connaissais déjà, elle ne m’a qu’effleuré !

Plus d’application, juste un téléphone à touches, des sms qui mettent des heures à être écrits et une mémoire qui sature au-delà d’une cinquantaine de textos reçus ou émis. Que croyez-vous qu’il arrivât ? Pas grand-chose ! Là encore, on prend conscience que le sms est vu comme l’outil de conversation moderne, mais dans une conversation de visu, plein de choses passent à la trappe, on change de sujets, on rebondit, on fait preuve d’adaptation ou de répartie … rien de tout ça dans un sms : on est prié de tout avalé voire de réagir à tout et les sms deviennent des mails. Alors, quand on met des heures à écrire « merci » en appuyant 20 fois sur les boutons … on va à l’essentiel ou … on téléphone et on se parle. Quant à la mémoire, on s’aperçoit très vite que garder des messages pendant des années ne présente vraiment pas grand intérêt ! Qui vous demande ce que vous lui avez répondu il y a 6 mois ? Il faudrait déjà qu’il.elle se souvienne de ce qu’il.elle vous a écrit … 99,99 % de qui s’est passé il y a 6 mois n’a plus aucun intérêt. C’était hier et c’est fini (sauf si on a envie de rester dans le passé, celui où sont accrochées nos peurs).

Reste le GPS, je l’ai remplacé par des cartes en papier et quand je ne trouve pas, je demande aux passant.es et figurez-vous que ça fonctionne aussi bien sauf que peut-être, je vais moins vite car pour trouver mon chemin, je suis obligé d’être attentif à ce(ux) qui m’entoure et non pas à cet écran “sapin de Noël” qui me montre les bouchons, les radars, les points d’intérêts, les bars et les superettes.

Épisode 4 : épilogue

Vous pourriez vous demander pourquoi je vous raconte ainsi ma vie, vous pourriez aussi penser que je ne suis qu’un « décroissant » comme des milliers d’autres et vous pourriez enfin vous demander ce que cet article peut bien faire sur un blog d’hypnose. Et bien, il ne parle que d’hypnose, celle pratiquée par mon smartphone sur mes neurones : en 20 ans il m’a fait croire : que j’avais besoin de lui pour me souvenir des choses importantes de ma vie, que j’avais besoin de lui pour trouver une petite copine, que j’avais besoin de lui pour trouver mon chemin, que j’avais besoin de lui pour jouer, reconnaître une plante, apprendre et que j’avais besoin de lui pour rester en contact avec ceux que j’aime et le monde, et tout ça en me faisant croire que je devais le faire vite.
TOUT ÉTAIT FAUX !
Je suis sorti de mon état d’hypnose et je n’ai pas décru, j’ai repris le contrôle de moi et de mes capacités, j’ai arrêté de croire que j’étais un incompétent qui, sans smartphone, serait perdu et exclu du monde surtout à chaque changement de version du système d’exploitation qui me replongeait dans cette incompétence. Aussi parce que toutes mes applications, je les avais choisies pour m’aider donc dans les domaines où je me sentais déjà incompétent : j’appuyais moi-même là où ça faisait mal et m’y enfonçait allègrement tout en étant certain de m’aider. … j’ai finalement retrouvé un peu de mon chemin sans que personne me dise où il était, un peu du vrai monde et beaucoup de liberté …

# Déshypnotisons-nous

← Article précédant

On ne nait pas ... on le devient

Article suivant →

Tu devrais aller voir quelqu'un