Je pense donc je est
Non, il n’y a pas de grossière faute de conjugaison dans le titre, il y a une volonté de penser que « je » n’est pas moi, mais seulement une partie de moi, un outil à mon service.
Descartes, dans son célèbre « cogito ergo sum » (je pense donc je suis) façonne la pensée occidentale, il nous dit que, parce que je pense, je suis. Il met en parallèle la condition de la vie et la pensée, les rend consubstantielles. En raisonnant ainsi, il définit « je » et ma pensée, comme un tout indissociable et m’enferme dans ma pensée m’empêchant dès lors d’en sortir puisqu’elle est « je » et que je ne saurais sortir de « je » sans disparaître.
L’enjeu selon moi, est précisément là : sortir de « je » sans disparaître mais – bien au contraire – en devenant. Il s’agit de cesser de croire nos pensées, aussi simples mais en même temps aussi fortes que « je suis fumeur.euse », « je suis jaloux.se » ou « je suis intelligent.e ». Si l’on parvient à sortir de ces pensées, alors, ce « je » là n’existe plus et nous nous en libérons sans pour autant nous effacer, nous devenons simplement un peu plus nous-même. Mais ce sont bien nos pensées, notre mental qui, persuadé qu’il est ce qu’il produit : la pensée, ne peut en sortir.
L’hypnose, pour moi, commence ici : croire que nous sommes ce que nous sommes. Or, ce que nous sommes n’est pas nous mais la somme de nos expériences, de nos éducations, de nos émotions et, plus encore, la somme de toutes nos peurs de perdre tout cela, de perdre nos pensées. C’est ainsi que nombre d’entre nous ont peur de changer, ceux.celles-là, sont souvent les plus intelligent.es puisque plus les pensées sont fortes, brillantes, plus elles ont peur de ne plus être, de même que plus on possède une belle voiture, plus on a peur de l’abimer.
« Je pense donc je est » signifie qu’il y a moi et un autre, cet autre est le « je », celui auquel je m’identifie mai qui n’est qu’une illusion, il n’est que ce que je crois être, que le produit de mes pensées. « Je » n’est pas moi, « je » est ce que fabrique mes pensées. « Moi » est infiniment plus grand que cela puisque la vie ne saurait être circonscrite à de simples pensées n’est-ce pas ? Car cet arbre, ce coucher de soleil, cet instant, existent au-delà de nos pensées et sont infiniment plus vastes que la définition que nous en donnons. Si nous cessons de croire une pensée aussi simple que « je suis triste » ou « je suis directeur.trice », nous sortons de la tristesse puisqu’elle n’a plus d’objet, de même, nous sortons de notre « pouvoir » de directeur.trice. Les faits qui ont généré l’une et l’autre de ces croyances peuvent alors être envisagés avec un autre regard puisque nous sommes libéré.es des pensées qui la définissent. En appliquant cela à tout, progressivement, alors autre chose peut apparaître, quelque-chose de plus grand que le simple produit de nos pensées. Mais le mental croit qu’en dehors des pensées rien n’existe alors, ce « plus grand » est inenvisageable et ressemble bien plus au chaos qu’à la lumière.
En cessant de croire nos pensées, nous cessons de croire qui nous sommes et pouvons alors laisser « moi » devenir puisqu’il est libre d’être plutôt que d’être pensé, défini, catégorisé. Nos pensées précèdent nos mots, nos mots précèdent nos actes, nos actes nous définissent bien plus sûrement que nos pensées, si nous cessons de nous identifier à nos pensées, nous changeons qui nous sommes, ce que nous croyons et ce à quoi nous réagissons et nous accrochons, nous n’avons plus peur de perdre quoi que ce soit, surtout pas ce que nous croyons être.
« Je » n’est pas le patron, « je » n’est qu’un outil, mais il ne veut pas l’entendre. Il « suffit » de le lui apprendre :)