Demain n'existe que dans votre tête

Chacun.e de nous voudrait savoir de quoi demain est fait, si nous devons prendre un parapluie ou un maillot de bain, si l’examinateur sera de bonne humeur, si notre patron.ne acceptera de nous augmenter ou si ce garçon, cette fille acceptera de nous embrasser. Demain est le premier des inconnus, celui que nous aimerions connaître pour le maitriser.

Récemment, j’ai entendu une pub qui disait quelque-chose comme « pour vraiment contrôler demain ». On croit rêver ! La seule chose que nous pouvons contrôler demain, c’est nous-même, et encore. Nous pouvons réviser nos examens le mieux possible, être le plus aimable ou désagréable possible, nous pouvons prévoir un parapluie et un maillot de bain mais nous ne pouvons même pas être sûr.e que demain, nous aurons envie d’embrasser ce garçon ou cette fille, parce que demain n’est pas aujourd’hui.

Le monde – et nous-même - essaie de tout contrôler y-compris le futur. Zone d’incertitude gigantesque, il représente l’inconnu et donc, pour l’immense majorité d’entre nous, un danger potentiel conscient ou pas. Nous avons tellement été habitué.es à considérer le futur comme une continuité maitrisée avec aujourd’hui que nous ne nous apercevons plus qu’il n’existe que dans notre tête, là où la réalité est totalement fabriquée, en fonction de nos envies, de nos goûts et de nos peurs.

Mais tout change, tout le temps. La météo n’est pas celle qui était annoncée, les travaux dans cette rue n’était pas prévu et il.elle n’a finalement pas pu venir à notre rendez-vous parce que sa grand-mère a cassé sa pipe. Vous pouvez tout recommencer, imaginer autre chose et trouver d’autres peurs. Votre cerveau, lui, est content, il a de quoi nourrir son espace, celui où il imagine tout et n’importe quoi du moment qu’il vous évite de changer.

« Changer » n’est pas ce que vous croyez

Quand j’écris « changer », je ne veux pas dire que vous allez réussir ou rater cet examen dont l’obtention vous permettrait de changer de vie, « changer » en l’occurrence signifie que nous faisons toujours la même chose pour atteindre notre but et, paradoxalement, notre but peut être de rater. Prenons un exemple : le permis de conduire. Évidemment, tout le monde veut le réussir, il permet d’être autonome, d’emprunter la voiture des parents pour aller, enfin seul.e aux soirées, de pouvoir trouver un job, etc. Et pourtant, malgré une excellente préparation, nombreux.euses sont ceux.celles qui le ratent à plusieurs reprises. C’est que c’est, inconsciemment, leur but. « Si j’obtiens mon permis de conduire, je vais devoir me conduire comme un.e adulte », mais le monde des adultes me fait peur. « Si je peux me déplacer seul.e, mon père n’aura plus à s’occuper de cela pour moi et je perdrai son attention » et l’attention de mon père est tellement importante pour que je me sente aimé.e … On pourrait imaginer des centaines d’exemples qui montrent comment l’échec peut être le fruit d’une volonté inconsciente. C’est ça ne pas changer : tout faire – inconsciemment en général – pour ne pas changer notre manière de faire et donc d’aboutir aux mêmes résultats.

Demain doit être la prolongation d’aujourd’hui

Pour ne pas avoir peur de demain, il suffit de l’imaginer tel qu’aujourd’hui, non pas dans son déroulement heure par heure mais dans son obéissance aux mêmes codes. Je ferai ceci et cela et donc il se passera ça. Nous voilà confortables, tout se passera une fois de plus comme prévu puisque nous réagirons demain comme nous avons réagis hier et avant-hier … mêmes causes, mêmes effets … mêmes conneries si hier c’en étaient déjà !

Mais demain n’existe que dans notre tête et sa volonté de tout contrôler même ce qui n’est pas contrôlable : l’extérieur. Alors, pour cela, nous imaginons ce qui va se passer, nous nous mettons constamment dans la tête de l’autre, nous imaginons le.la connaître par cœur et lui supprimons par la même le droit au changement en projetant sur lui.elle notre propre incapacité. Stop !

Vous voulez que votre vie change ? Vous voudriez arrêter de fumer, perdre du poids, sourire plus, être moins agressif.ve, écouter mieux, aimer les brocolis et ne plus avoir peur des chiens ? Arrêtez simplement de savoir ce que sera demain ! Arrêtez de penser que demain vous fumerez, que vous mangerez trop gras, que vous détesterez les brocolis ou que vous croiserez ces chiens. Arrêtez de vous connaître, de vous envisager à l’identique chaque jour. Au moins, testez ! Faites les choses différemment, juste pour voir, pour voir si ces brocolis que vous avez détesté à la cantine il y a 20 ans ont toujours le même goût, pour voir ce que ça fait de simplement ne plus dire « je suis fumeur.euse », essayez de sourire à cet.te abruti.e qui vous agace depuis des années.

Arrêtons de penser demain aujourd’hui, contentons-nous de le vivre pleinement demain, d’en faire l’expérience concrète plutôt que de l’imaginer avec notre tête. Laissons-nous toucher demain avec nos mains et nos pieds et le ressentir avec notre cœur. Demain n’existe pas tant que nous n’y serons pas allé.es alors il est inutile de l’imaginer, ça ne se passera pas comme ça de toutes façons.

Demain, vous serez différent.e quoi qu’il arrive et le vous d’aujourd’hui aura disparu quoi qu’il arrive parce que vous aurez fait des rencontres, vous aurez appris un truc qui vous changera. Il n’y a que votre cerveau qui ne le sait pas, qui vous fait rester le.la même pour ne pas avoir peur de l’inconnu.e, cet inconnu.e qui est déjà là sans que vous le sachiez : ce « vous » meilleur pour vous-même. En somme, il s’agit de faire votre expérience aujourd’hui plutôt que de laisser votre cerveau imaginer demain sur les bases erronées d’hier.

# Déshypnotisons-nous